La série sur le journalisme dans l’espace francophone se poursuit (voir les interviews précédentes) avec l’interview d’Adama Coulibaly, journaliste à Walf quotidien. Le Cercle des Communicants et des Journalistes Francophones (CCJF) précise que son point de vue est personnel et n’engage pas le CCJF.

Pour vous, les médias servent à quoi ?

Les médias doivent, à mon avis, être des moyens pour informer l’opinion sur les réalités du pays. C’est-à-dire, informer les populations sur la gouvernance et sur les difficultés que rencontrent les populations. Les médias doivent servir de lien entre les administrateurs et les administrés. Mais également, les médias peuvent servir de moyens de pression et de contrôle des actions gouvernementales.

Faites-vous une différence entre journaliste et communicant ? Si oui, laquelle ?

Il y a une grande différence entre le rôle d’un journaliste et celui d’un communicant. D’abord, un journaliste, c’est celui qui collecte l’information, la traite et la diffuse auprès de l’opinion. Ainsi, le journaliste a pour objectif d’informer juste et vrai sur un fait, un évènement. Contrairement au communicant, le journaliste ne cherche pas à manipuler l’opinion mais à rendre public une information vérifiée. Le communicant, au contraire, a des intérêts avoués ou non avoués dans les informations mises à la disposition de ses cibles. Son rôle est de vendre à l’opinion ou à ses cibles une imagée réajustée ou soignée d’une personne, d’une entreprise etc.

Quels sont les grands médias écrits et audiovisuels dans votre pays ? A qui appartiennent-ils ? Quelles sont leurs lignes éditoriales ?

Parmi les organes présents au Sénégal, je considère comme grand media, le groupe Walfadjri. C’est l’un des premiers groupes qui a toujours été du côté du peuple. Son fondateur, El Hadji Sidy Lamine Niass a été au premier rang des combats démocratiques au Sénégal. Cet organe privé a une ligne éditoriale que les autorités de tous les régimes du pays considèrent comme hostile à leur politique. Parce que, c’est un organe qui ne s’est jamais allié à un régime présidentiel. Il a toujours été du côté des populations en dénonçant les conditions de vie difficile des populations. L’organe est très critique vis-à-vis des politiques et des régimes en place. Ce qui fait aujourd’hui, sa notoriété dans le pays.

Quelles sont les difficultés d’exercice du métier de journaliste dans votre pays ?

Être journaliste au Sénégal est comme le parcours du combattant. Les journalistes sont confrontés à d’énormes difficultés économiques, matérielles et sociales. Les salaires sont très bas et les moyens ne suivent pas pour faire un travail de qualité. Le mode économique des organes dans le pays n’est pas viable. Presque tous les organes traversent des difficultés économiques. Et, ceux qui s’opposent au gouvernement comme le groupe Walfadjri, disposant d’une télévision, d’un quotidien et de trois radios sont les plus fatigués.

Quels sont pour vous les 3 plus grands journalistes de votre pays ? Pourquoi ? Quels sont les journalistes de votre pays qui sont pour vous des modèles ?

Personnellement, je n’ai pas de modèles dans la presse de mon pays. Parce que, je ne vois pas un journaliste qui répond à mes critères de modèles dans ce pays.

Que faudrait-il faire selon vous pour améliorer le journalisme dans votre pays ?

Pour améliorer les conditions d’exercice du journaliste au Sénégal, il faut d’abord une loi protectrice pour les journalistes et les organes de presse. Cette loi devrait faire en sorte que les organes ainsi que les journalistes soient à l’abri du besoin et protégés contre les régimes en place. Souvent, des organes sont obligés de s’aligner au pouvoir en place à cause des chantages économiques et financiers des politiciens au pouvoir. Ils interdisent aux institutions de l’Etat et à l’ensemble de ses démembrements d’octroyer de la publicité aux organes qui ne sont pas positifs avec le régime. L’objectif, c’est d’étouffer économiquement l’organe afin de le faire disparaitre.

Interview publiée en mars 2021

Vous souhaitez également être interviewé ? https://cercledescommunicants.com/2019/02/23/journalistes-francophones-journalisme-francophonie/.